
8.04.2010
Inception - Christopher Nolan

12.20.2009
une Montagne

Extrait d’un entretien avec Francis Ford Coppola au moment de la promotion de Tetro à Paris en novembre 2009, propos recueillis par Cyril Béghin et Stéphane Delorme. Tiré du numéro de décembre 2009 des Cahiers du cinéma - nº651 –
Alors que nombre de cinéastes émergents se mettent dans tous leur états pour ne pas que le cinéma que l’on connaît soit perdu – lorsque par exemple, on s’entête à faire la gloire de la pellicule, à la voir comme le seul vrai support du cinéma – des cinéastes d’expériences, comme Francis F. Coppola, qui ont marqués l’apogée de ce cinéma à peine centenaire, ne semblent pas du tout complexés de voir qu’ils n’auront jamais terminé d’apprendre comment manier cette matière de son et de lumière en constante évolution :
[…]
Cahiers du cinéma/Durant cette discussion, donc, vous disiez que le cinéma est maintenant plus « malléable », et qu’un réalisateur peut modifier son film jusqu’au moment de la projection…
Francis Ford Coppola/ … ou au cours de la projection…
/ Vous vous imagineriez, dans le futur, comme un projectionniste, envoyant des images partout dans le monde depuis un même endroit?
/ Non, là, avec les spectateur, et plutôt à la manière d’un DJ ou d’un chef d’orchestre dirigeant un opéra.
/Vous avez déjà essayé?
/ Non, pas vraiment. Tout ce que je peux dire c’est que depuis cent cinquante ans, l’art est reproduit techniquement. Cette reproduction était, à l’origine, une nouveauté excitante en elle-même. Aujourd’hui, une œuvre d’art sur DVD ou autre support, on connaît, ça ne vaut plus rien, on peut en obtenir et en copier à n’importe quel moment.
Le cinéma connaît actuellement de graves difficultés. L’époque où les maisons de disques faisaient payer 20 dollars un enregistrement qui leur coûtait 90 cents et où les dirigeants s’achetaient des Ferrari avec l’argent encaissé, cette époque est arrivée à son terme avec l’avènement des réseaux de partage de fichiers. Si vous acheté un disque, ou un film, vous pouvez bien en donner une copie à un ami. Bien sûr, ça fait trembler les bases financières du système. Ajoutez à cela le piratage et la concurrence du sport ou de la télévision-spectacle. Alors le cinéma panique. Regardez toute la course au 3D, ils n’ont même pas réussi à trouver un système sans lunettes, c’est le même cinéma en relief que dans les années 50!
Tout cela pour dire : lorsqu’un fleuve comme le cinéma se heurte à une montagne, il trouve une voie pour continuer à exister. C’est comme une langue qui parfois, et c’est le plus intéressant, va se mêler à une autre. L’allemand s’est mélangé au latin et est devenu, au fil de centaines d’années, une nouvelle langue. Tout le monde croit savoir ce que sont les films parce qu’on vient de traverser un merveilleux siècle de cinéma, mais personne ne sait de quoi ils auront l’air dans quinze ans.
[…]
12.16.2009
Notes de projections - Antichrist / 22.10.9

Antichrist de Lars Von Trier . 22.10.9. 12h00 . Le Latina / Paris . Salle 2.
Au moment où le générique de fin se termine:
[…]
Surgit alors un cri, monocorde mais rageur, exagéré mais tout de même inquiétant.
C’était un autre spectateur, quelques rangés devant. Il s’était levé pour pousser son hurlement. C’était le seul autre spectateur de la projection. Il était visiblement mécontent. Je le regardai furtivement puis fît mine de rien. Chacun à droit à son intimité, à mon avis, dans une salle de cinéma. Je dû tout de même brièvement avoir un air surpris et interrogateur. Il me répondit, plus serein mais tout de même gravement irrité, à moi et probablement au projectionniste dans sa cabine. Qu’ils ne se demandent pas, commença-t-il à dire, pourquoi il y a de moins en moins de public dans leurs petites salles chieuses. Si c’est pas ce putain de point lumineux en plein milieu, derrière l’écran[1] qui fout tout en l’air, c’est cette attardée qui fait les allés retours dans la salle![2] Ça nous apprendra à venir dans ces salles de quartier, dit-il en me regardant avec un clin d’œil, cynique. Hé, oh! cria-t-il, projectionniste! Et il continua. Il voulait vraiment se faire entendre. Mais il parlait à un mur. Littéralement. Et ça ne l’aidait pas à se calmer. Je pris mes choses et sorti. Je passai par les toilettes. En sortant du cinéma, je le retrouvai sur le trottoir en train d’engueuler la guichetière, en pause, fumant sa cigarette et qui ne comprenait rien à son histoire de point lumineux.
[1] Il avait raison, j’avais remarqué aussi, en début de projection, ce point lumineux qui paraissait derrière l’écran, au travers des images projetées. J’avais réussi à en faire abstraction.
[2] Il y avait effectivement eu quelqu’un qui était entrée dans la salle durant la projection et qui n’avait cesser de se déplacer entre les sièges ou d’entrer et de sortir de l’endroit tout au long du film. Elle ne pouvait pas manquer de faire du bruit et ne ratait pas de perturber le visionnement.
[…]