9.24.2009

À LIRE

Mortes tous les après-midis

par André Habib

et

Le cinéma qui nous veut du bien

par Nicolas Renaud

dans Hors Champ 

À propos de la léthargie cérébrale de la critique et de la production de cinéma québécois profitant aux logiques de marché. Avec Polytechnique de Denis Villeneuve pour exemple. L’enjeu est d’autant plus important avec ce film du fait qu’il touche à un événement important de la mémoire collective. Au contraire d’autres coquilles vides auxquelles on pourrait reprocher de ne pas travailler le corps de l’identité québécoise, ce film en annule un de ces éléments constitutifs.

Dommage que les propos toujours lumineux tenus dans cette revue électronique tombent quasi systématiquement dans les abysses alors qu’ils tentent sans détours de secouer les divers actants du cinéma, qu’ils soient créateurs, critiques, producteurs ou spectateurs.

Polytechnique . Denis Villeneuve . 2009 . Alliance Vivafilm

9.22.2009

Un prophète . Jacques Audiard


Salle presque que comble au cinéma UGC Gobelin de Paris (+ ou – 350 places), mardi soir, 1er septembre, de tous les âges, tintamarre de paroles, de bouchées de pop-corn et de changements de sièges. Ça retiens son souffle au long de la projection et on entend des rires nerveux lors de scènes violentes ou des séquences qui se tendent à l’onirique. Le film d’Audiard a fait fureur auprès des critiques internationales lors de sa présentation à Cannes en mai dernier et fait maintenant vedette en cette fin d’août en France.

Malik, à 19 ans, écope d’une peine de 6 ans dans un centre de détention des plus durs. D’abord obligé de commettre un meurtre au profit du gang de détenu corses, il devra apprendre le code social dur mais pas si différent de la vie des malfrats en libertés. En fait, c’est du pareil au même, le jeune prisonnier aura après quelques temps à faire à l’extérieur des murs de la prison et il le fera soit par l’entremise de connaissances ou tout simplement en cherchant à avoir des permissions de sorties pour bon comportement. Il s’agit donc d’un microcosme du monde extérieur, sorte de concentration de la vie et du quotidien populaire.

Un peu à la manière de De battre mon cœur s’est arrêté, Audiard lance le spectateur sur une sorte de suspense de gangster, ou encore, dans une représentation réaliste à l’esthétique documentaire de la vie carcéral en France. La proximité entre les acteurs et la caméra et la manière qu’ils ont d’interagir dans un lieu qui les restreint tous rappellent le réalisme propre aux films de Cassavetes. Mais comme pour son film précédent, il s’agit du récit d’une transition pour le personnage principal et ce changement se fait comme à l’insu du spectateur qui cherche à nouer l’intrigue, ou encore, qui veut connaître le réel quotidien d’une prison de ce type. Alors qu’on suit l’ascension de Malik dans le monde des criminels à l’intérieur et à l’extérieur des murs, le spectateur est surpris (rires nerveux, souffles coupés) par des détournements plus personnels, oniriques ou comiques, de manière semblable aux autres personnages du récit ébahis par l’aisance avec laquelle il arrive à prendre le dessus sur leur monde. C’est cette révélation tranquille d’un héro surnaturel qui est le réel intérêt de l’œuvre d’Audiard et qui en est sa force. Le film, ses séquences, ses acteurs, sa bande-son et sa musique ne sont que matériaux au travers desquels on voit apparaître un personnage mythique tel que le cinéma est si apte à en produire et ce, d’une manière qui transcende les approches se voulant réalistes qui sont tant à la mode récemment et qui ne touchent pas toutes aussi bien au but.