12.27.2009

Where the wild things are - Spike Jonze


Le dernier film de Spike Jonze permet – comme rarement auparavant – une immersion totale du spectateur. À l’ère des grands déploiements numériques peu de cinéastes arrivent à tirer une vision cohérente et constructive des nouvelles technologies que peut s’offrir le cinéma du 21e siècle – pensons aux films récents de Burton, Gilliam et Coppola, pour ne s’en tenir qu’au plus connus. Jonze propose toutefois une œuvre fraichement originale et en plus, au contraire des autres réalisateurs cités, d’une sincérité gracieuse, enlevante. L’éclat des prouesses numériques n’y est en aucun cas en vedette. La carcasse numérique n’a pas été abandonnée sur l’écran sans être animée d’une personnalité concrète – au contraire d’Avatar, film aussi immersif, sorti la même date en France. Le tout est sous-tendu par un discours double sur la connaissance de soi et le désir de maîtrise de soi-même – ce « soi » pouvant tout autant être celui d’un petit garçon – Max – que celui du cinéma numérique.

Les effets numériques sont admirables, pas révolutionnaires dans leur rendu technique mais présentés d’une manière peu commune. Ils ne sont pas le clou du spectacle. Ce qui leur permet de passer presque inaperçus est le maniement à l’épaule de la caméra. L’accent est ainsi posé sur une idée fugitive du réel : la mise au point n’est pas toujours nette et les difficultés parfois apparente à suivre les sujets. L’image n’est pas complètement travaillée ni détaillée comme nous y ont habitués les films numériques à grand déploiement – l’exception de Cloverfield nous traverse par contre l’esprit. Les prouesses des effets spéciaux sont d’ailleurs présentées de manière tout à fait originale et humble. Les monstres n’ont pas de pouvoirs spéciaux leur permettant de faire des actions extraordinaires – lire : possibles qu’avec des effets numériques. Ils sont plutôt des bêtes sauvages qui se jettent l’une sur l’autre, se cognent contre les arbres ou se fracassent contre des parois rocheuses. Le travail d’effets spéciaux et de création d’un univers nouveau est modeste, prudent et parfaitement maîtrisé. Les créateurs se sont bien appliqués à développer ce qu’on semble laisser trop souvent de côté : les corps. Comme pour se débarrasser de tout superflu et arriver au meilleur résultat en tentant de maîtriser ces nouvelles technologies numérique. Tous les personnages évoluent dans un décor réaliste – une sorte de forêt, la mer, un désert parfois – mais ils sont pour leur part extrêmement originaux : on a rarement vu de tels monstres au cinéma.

Ce qui contribue d’abord à la réussite de ces créatures numériques est d’abord la qualité de leur personnalité et de leur psychologie. Encore une fois, ils ont été pensés avec retenue et efficacité. Chaque monstre représente une facette émotive humaine isolée. Au lieu d’ambitionner à créer une culture entièrement différente à ces personnages – et de risquer de tomber dans le piège d’un exotisme conventionnel, ils se rattachent à des formes humaines d’émotions, poussées à leurs paroxysmes. S’ils ont des corps presque entièrement inattendus – leurs visages sont humains : vecteurs des émotions – leur personnalités rappellent justement que le point de référence de ces inventions imaginaires restera toujours l’homme. Et ce point d’appui permet justement de reconfigurer, comme il l’est fait avec leur physique, les contours de notre squelette émotionnel. Le propos du film tient justement dans se rapport entre les corps et les émotions : ces dernières apparaissent comme des monstres à diriger de force – par le mensonge et la croyance entre autres – alors qu’elle n’ont cette apparence effrayante et étrangère que parce que justement on ne veut pas les percevoir comme humaines.

Le périple de Max prend donc la forme d’une fable sur la reconnaissance de ses propres émotions et sur la manière de les maîtriser. De la même manière, le film se pose comme un travail semblable d’exploration des possibilités des effets d’animation numérique et de la manière de les faire prendre l’espace qui leur convient sur l’écran. Rien ne sert de les prendre d’assaut ou de les faire mentir – les effets spéciaux sont autant faits pour recréer le réel que Max est le roi de tous ces monstres, ils ont une place qui reste à déterminer et ils faut les comprendre pour qu’ils s’expriment à leur meilleur. 

22h00 - 22.12.09 - MK2 Odéon - Paris

12.26.2009

The Dead - John Huston


Le film de John Huston – basé sur une nouvelle de James Joyce, tirée de The Dubliners – se présente comme une collection de rituels mondains partagés par un groupe de personnes à l’occasion de l’Épiphanie : danse, chants, récitation d’un conte ou la tradition du vœu entre deux personnes tirant sur l’os de la dinde sont les rites les plus évidents. Huston les montres avec une attention toute particulière à l’aide de longs gros plans mettant le temps en suspension. D’autres événements tiennent aussi de rituels que l’on pourrait qualifiés de familiaux. Il y a par exemple l’alcoolisme de Freddy Malins qui est anticipé longuement avant sont arrivée à la soirée. Il semble alors qu’il soit toujours bourré et surtout, qu’il gâche à tout coup ce genre de soirée. Il lui arrive en effet d’être un peu dérangeant sans pour autant vraiment mettre en péril la poursuite de la fête. Sa mère se fait d’ailleurs un devoir de démontrer le plus explicitement possible son mécontentement vis-à-vis du comportement de son fils. La manière dont est traité l’alcoolisme de Freddy par la parenté tient presque d’une tradition et il est même à considérer l’option que s’il est saoul à toutes les années c’est qu’il se sente obligé de ne pas décevoir les attentes des convives.

De la même manière, le film se reçoit comme un collier de micro-récits. Tous les commentaires et histoires que se passent les personnages sont finaux aussitôt dits. Le principal intérêt devient alors de tenter de retracer le fil qui relie tout les morceaux de récits qui composent le film. Une incertitude se pose alors : il n’est pas certain que le spectateur doivent déceler le « mystère » qui rendra cohérent tous les événements qu’on lui présente où s’il devra plutôt se contenter de les observer tels qu’ils sont sans chercher à leur trouver de signification supplémentaire. C’est le problème qui frappe aussi le personnage principal – Gabriel Conroy: toutes ces cérémonies semblent vide de sens concret, simplement répétées par tradition et sans attache à la réalité. Les scènes finales, alors que la fête est terminée et que Gabriel et sa femme Gretta se rendent à leur appartement, présentent l’apparition de cette prise de conscience par le personnage. Bien qu’il ait été mal à l’aise tout au long de la soirée, il lui apparaît évident alors que ce qui est à l’origine de toutes ces cérémonies lui échappera à jamais, il n’arrivera jamais à les comprendre rationnellement. C’est au travers d’un enchaînement d’événements entre lui et sa femme que cette révélation est mise à jour. Il la voit pleurer dans les escaliers de l’hôte en écoutant une chanson. Ils n’arrivent pas à se parler sur le chemin de retour, ils ne sont pas sur la même longueur d’onde. À leur arrivée, il lui demande pourquoi elle pleurait et elle lui répond alors avec une profonde tristesse que la chanson entendue lui rappelait un amour de jeunesse, décédé avant qu’ils n’aient pu le concrétiser. Il comprend alors – dans un monologue en voix off tiré mot pour mot de la fin de la nouvelle de Joyce – qu’il ne pourra pas, malgré tout ses efforts, connaître sa femme comme elle l’a été pour ce premier amour.

21.12.9 – 20h30 – Le Champo - Paris

12.25.2009

Avatar - James Cameron


On a entendu parler du nouveau film de James Cameron pour ce qu’il aurait de révolutionnaire, bien avant d’en connaître le récit ni même avant d’avoir une idée de ce qu’il aurait de si exceptionnel dans son contenu ou dans sa forme. On nous parlait d’un film révolutionnaire, transformant le système d’exploitation et de diffusion du cinéma bien avant d’envisager qu’il modifie la face des films hollywoodiens. Avatar ne devait être projeté en salle que sur support numérique – aucune copie 35mm. Si les exploitants de salles de cinéma ne voulaient pas passer à côté du succès qu’on leur promettait avec le dernier blockbuster de Cameron, il fallait qu’ils s’équipent en équipement de projection numérique. Mais le plan initial est tombé à l’eau – la grande vague de rééquipement n’a pas eu lieu.

Le réflexe face à une telle ambition a été de faire de ce film une démonstration spectaculaire des moyens technologiques et numériques qu’a acquis le cinéma hollywoodien. Le prix à payer : la faiblesse du récit ou du moins d’une cohérence cinématographique. Le squelette narratif se retrouve bien tracé mais comme sectionné de passages spectaculaires et même carrément digéré d’avance. Une forme faible de récit doit être présente pour conserver une idée de progression – qui a constitué l’attribut majeur du premier siècle du cinéma – mais est tout de même clairement mise à mal : elle n’est plus importante. Signe d’un cinéma en mutation? Certainement. Aboutissement d’une révolution du cinéma? Loin de là : on n’en est qu’à ses premiers barbouillages.

L’effet d’immersion - la projection 3D est nécessaire pour en saisir toute l'ampleur, la qualité technique des effets spéciaux, en présence autoritaire, et l’originalité de la création d’une esthétique originale sont tous excellemment réussi. Et la faiblesse du récit n’est jamais regretté : le spectacle cinématographique fait largement le travail pour captiver le spectateur. Comme aux premiers temps du septième art, l’intérêt d’aller voir ce film réside justement dans la curiosité du dispositif et l’émerveillement qu’il peut procurer. On assiste réellement à la démonstration de nouvelles évolutions technologique comme on le faisait avec le cinématographe à l’origine.

La réaction du public lors de la projection à laquelle j’ai assistée en était d’ailleurs une preuve concrète : tous ont applaudi à l’apparition du générique sur l’écran. Une autre réaction commune de l’assistance fût des rires nerveux lors de scènes amoureuse entre deux des extraterrestres – les Na’vi – qui mettait en lumière une faiblesse du rendu crédible d’une création totale d’un peuple et d’un monde sur écran.

Il ne suffit pas – c’est ce que ce film permet de comprendre – de donner à ces Na’vi une apparence et un monde parfaitement détaillés et crédibles visuellement pour que l’artifice fonctionne. Les extraterrestres de James Cameron manquent terriblement de personnalités et de culture. Tous les clichés des peuples primitifs s’y retrouvent. Ils se déplacent et crient comme des animaux sauvages, vivent dans une jungle et parlent une langue gutturale. La trame musicale offre un mélange parfois trop appuyé de musique occidentale – lire humaine – et de musique tribale avec percussions africaines, associée aux Na’vi.

Avatar laisse entrevoir un retour vers un spectateur des premiers temps : émerveillé plutôt qu’éveillé. Le problème de la crédibilité des Na’vi et de leur monde – visuellement réussis, culturellement absolument pas originaux –  permet par contre de mettre en lumière un questionnement qui est propre au cinéma numérique : doit-il s’affirmer comme spectacle technologique ou plutôt s’efforcer d’utiliser ses attributs nouveaux pour créer une matière cinématographique réellement neuve et mutée?

Projection de 21h10 au MK2 Quai de Scène le 20.12.9 - Paris.

+ 4.2.10 :

À LIRE: Le cinéma total selon James Cameron

Du cinématographe

"Après donc avoir analysé la technologie de la reproduction mécanisée du réel en une image photographique, Bazin nous souligne que ce simple réalisme de l’image, cette ontologie, n’est pas, en soi, un art; il faut encore qu’il y ait quelque chose à exprimer, à communiquer. Il y a un langage supposé et permis par cette ontologie qu’il faut honorer de par ses propositions esthétiques (ou plutôt éthiques)." LIRE EN ENTIER

12.24.2009

Tetro


Extrait d’un entretien avec Francis Ford Coppola au moment de la promotion de Tetro à Paris en novembre 2009, propos recueillis par Cyril Béghin et Stéphane Delorme. Tiré du numéro de décembre 2009 des Cahiers du cinéma - nº651 –

[…]

Cahiers du cinéma/ Lorsque Vincent Gallo arrive à l’enterrement, un autre cinéaste aurait certainement consacré une scène au drame familial, dans un autre lieu, et une scène à la cérémonie grandiose avec l’orchestre.

Francis Ford Coppola/ Vincent a dit qu’il n’irait pas à l’enterrement d’un père comme celui-là, qu’il ne porterait pas un costume, etc. Il voulait attendre dehors. Parce que Vincent ne s’entendait pas avec son propre père. Mais je l’ai convaincu de venir et donner la baguette de chef d’orchestre au vieil oncle […].

/ Vincent Gallo disait : « Tetro n’irait pas à l’enterrement » ?

/ Il ne parlait pas de Tetro, il était Tetro. Il a simplement dit : « Je n’irais pas. »

[…]

12.20.2009

une Montagne


Extrait d’un entretien avec Francis Ford Coppola au moment de la promotion de Tetro à Paris en novembre 2009, propos recueillis par Cyril Béghin et Stéphane Delorme. Tiré du numéro de décembre 2009 des Cahiers du cinéma - nº651 –

Alors que nombre de cinéastes émergents se mettent dans tous leur états pour ne pas que le cinéma que l’on connaît soit perdu – lorsque par exemple, on s’entête à faire la gloire de la pellicule, à la voir comme le seul vrai support du cinéma – des cinéastes d’expériences, comme Francis F. Coppola, qui ont marqués l’apogée de ce cinéma à peine centenaire, ne semblent pas du tout complexés de voir qu’ils n’auront jamais terminé d’apprendre comment manier cette matière de son et de lumière en constante évolution :

[…]

Cahiers du cinéma/Durant cette discussion, donc, vous disiez que le cinéma est maintenant plus « malléable », et qu’un réalisateur peut modifier son film jusqu’au moment de la projection…

Francis Ford Coppola/ … ou au cours de la projection…

/ Vous vous imagineriez, dans le futur, comme un projectionniste, envoyant des images partout dans le monde depuis un même endroit?

/ Non, là, avec les spectateur, et plutôt à la manière d’un DJ ou d’un chef d’orchestre dirigeant un opéra.

/Vous avez déjà essayé?

/ Non, pas vraiment. Tout ce que je peux dire c’est que depuis cent cinquante ans, l’art est reproduit techniquement. Cette reproduction était, à l’origine, une nouveauté excitante en elle-même. Aujourd’hui, une œuvre d’art sur DVD ou autre support, on connaît, ça ne vaut plus rien, on peut en obtenir et en copier à n’importe quel moment.

Le cinéma connaît actuellement de graves difficultés. L’époque où les maisons de disques faisaient payer 20 dollars un enregistrement qui leur coûtait 90 cents et où les dirigeants s’achetaient des Ferrari avec l’argent encaissé, cette époque est arrivée à son terme avec l’avènement des réseaux de partage de fichiers. Si vous acheté un disque, ou un film, vous pouvez bien en donner une copie à un ami. Bien sûr, ça fait trembler les bases financières du système. Ajoutez à cela le piratage et la concurrence du sport ou de la télévision-spectacle. Alors le cinéma panique. Regardez toute la course au 3D, ils n’ont même pas réussi à trouver un système sans lunettes, c’est le même cinéma en relief que dans les années 50!

Tout cela pour dire : lorsqu’un fleuve comme le cinéma se heurte à une montagne, il trouve une voie pour continuer à exister. C’est comme une langue qui parfois, et c’est le plus intéressant, va se mêler à une autre. L’allemand s’est mélangé au latin et est devenu, au fil de centaines d’années, une nouvelle langue. Tout le monde croit savoir ce que sont les films parce qu’on vient de traverser un merveilleux siècle de cinéma, mais personne ne sait de quoi ils auront l’air dans quinze ans.

[…]


12.16.2009

Notes de projections - Antichrist / 22.10.9


Antichrist de Lars Von Trier . 22.10.9. 12h00 . Le Latina / Paris . Salle 2.

Au moment où le générique de fin se termine:

[…]

Surgit alors un cri, monocorde mais rageur, exagéré mais tout de même inquiétant.

C’était un autre spectateur, quelques rangés devant. Il s’était levé pour pousser son hurlement. C’était le seul autre spectateur de la projection. Il était visiblement mécontent. Je le regardai furtivement puis fît mine de rien. Chacun à droit à son intimité, à mon avis, dans une salle de cinéma. Je dû tout de même brièvement avoir un air surpris et interrogateur. Il me répondit, plus serein mais tout de même gravement irrité, à moi et probablement au projectionniste dans sa cabine. Qu’ils ne se demandent pas, commença-t-il à dire, pourquoi il y a de moins en moins de public dans leurs petites salles chieuses. Si c’est pas ce putain de point lumineux en plein milieu, derrière l’écran[1] qui fout tout en l’air, c’est cette attardée qui fait les allés retours dans la salle![2] Ça nous apprendra à venir dans ces salles de quartier, dit-il en me regardant avec un clin d’œil, cynique. Hé, oh! cria-t-il, projectionniste! Et il continua. Il voulait vraiment se faire entendre. Mais il parlait à un mur. Littéralement. Et ça ne l’aidait pas à se calmer. Je pris mes choses et sorti. Je passai par les toilettes. En sortant du cinéma, je le retrouvai sur le trottoir en train d’engueuler la guichetière, en pause, fumant sa cigarette et qui ne comprenait rien à son histoire de point lumineux.


[1] Il avait raison, j’avais remarqué aussi, en début de projection, ce point lumineux qui paraissait derrière l’écran, au travers des images projetées. J’avais réussi à en faire abstraction.

[2] Il y avait effectivement eu quelqu’un qui était entrée dans la salle durant la projection et qui n’avait cesser de se déplacer entre les sièges ou d’entrer et de sortir de l’endroit tout au long du film. Elle ne pouvait pas manquer de faire du bruit et ne ratait pas de perturber le visionnement.

[…]

11.27.2009

Initiative


“Par ailleurs, le président d'Alliance Vivafilm [Patrick Roy] a annoncé son intention de créer un programme de stage en distribution de films à l'intention des étudiants en cinéma, communication et marketing des universités. Il souhaite aussi mettre sur pied un programme de diffusion de films québécois dans les institutions scolaires.”


Cyberpresse . Marie-Claude Girard . 27.11.9 . Article entier .

C’est le genre d’initiatives qui pourrait permettre au marché et aux systèmes de diffusions du cinéma au Québec et de films québécois de trouver des formes qui conviennent mieux à leurs spécificités – public réduit, résolument tourné vers des intérêts différents que ceux du public général du cinéma américain. Il semble être si difficile aux producteurs, distributeurs et diffuseurs québécois de se détacher du modèle américain. Pressions économiques sûrement. Un petit manque d’initiative peut-être.

Patrick Roy parle aussi de projections tests et de script-doctors… se tourner vers le public visé – reconsidérer des méthodes empruntées qui ne sont peut-être pas les plus convenables – semble être une bonne direction à prendre. Et pourquoi pas y voir un premier pas à l’aveugle, tout à fait inconscient, vers un résultat beaucoup plus poussé : une idée d’interactivité, une expérience redéfinie…

11.17.2009

Crise de la diffusion du cinéma: la solution de Jon Reiss

Jon Reiss, après avoir eu beaucoup de difficultés à vendre son documentaire Bomb It et avoir été complètement désillusionné avec le fonctionnement du marché cinématographique, a dicté un nouveau manifeste (à l’occasion du lancement d’un livre qu’il a écrit sur le sujet) pour les créateurs et grande compagnies de cinéma devant affronter les réalités nouvelles des nouveaux medias numériques.

Il lance des idées qui devraient être tout à fait éclairantes pour la multitude de réalisateurs voulant percer le marché, le plus souvent seuls devant leurs ordinateurs. Une des idées fortes est de considérer des facette de l’existence d’un film que la majorité oublient : il faut penser dès les tout débuts de la création et de sa préparation à la manière dont le film prévu pourra être distribué, diffusé, mis en marché et surtout, comment il arrivera a rejoindre le public auquel il est destiné. Ce côté, la bête noire de bien des jeunes créateurs soifs d’indépendance, est souvent aussi important que la création elle-même. Reiss suggère de l’envisager pour ce qu’il peut être avec suffisamment d’imagination : un travail tout aussi créatif et un œuvre ayant autant de valeur artistique et en ajoutant au projet complet. Il insiste sur les possibilités de la participation du spectateur aux processus de création et de marketing ou bien de la régénération de la projection cinématographique comme événement précieux.

Il touche aussi à un point qui peut ne pas paraître évident pour tous : un film ne peut se faire, de A à Z, sans l’aide de plusieurs personnes. Il le mets en évidence en suggérant créer un poste, dès la préparation du film, pour la recherche de distribution et de marketing.

         In other words – embrace restrictions as a mother of invention and opportunity.  This is not the solution for everyone, or every film – but it is something to consider. – J.Reiss

Les contraintes de marché sont souvent un enfer pour les réalisateurs les plus chevronnés, et même pour ceux qui s’y avance en se soumettant aux méthodes traditionnelles. Pour Reiss, les créateurs autant que les grandes compagnies doivent faire face à une même crise. Les acteurs influents du marché cinématographique doivent s’adapter, ajoute-t-il, mais les réalisateurs ont aussi tout un chemin à faire. Il y a à son avis moyen d’utiliser et de détourner les contraintes du marché à l’avantage des plus inventifs.

         The artificial divide between art and commerce must be eliminated. – J. Reiss

Il faut par contre douter un peu de cette idée de division entre art et commerce. Le problème auquel font face les industries culturelles tient plutôt du fait contraire, c’est-à-dire que des formes d’arts qu’ils ont réussi à marchandiser à merveille auparavant (cinéma, musique, etc.) sont maintenant accessibles gratuitement – et illégalement – et avec de nouveaux avantages (mobilité, immédiateté, etc.) grâce aux nouveaux medias. Évidemment, il est possible de forcer les mécanisme de ce marché pour s’y trouver une place, mais il se pourrait tout de même, dans un monde où la manière d’approcher les médias de toutes formes est des plus sensible au changement drastiques, que la valorisation de l’art, sa mise en marché, ne soit pas la solution à venir. 

Jon Reiss croit dur comme fer à sa vision des chose: ce manifeste ressemble d'ailleurs étrangement à une technique de marketing pour son bouquin abordant le nouvel état des choses. Il applique à la lettre. Tout se vend, quand on s'y met.

Voici les 10 affirmations générales émises par Reiss dans son manifeste. Elles sont chacune largement détaillées et je vous conseille d’aller le lire en entier, c'est inspirant. Quelques passages de ce manifeste sont cités sous les affirmations.

 

1. KNOW YOUR FILM/KNOW YOURSELF 
EVERY FILM IS DIFFERENT AND SHOULD BE TREATED AS SUCH 

2. CHANGE YOUR ATTITUDE TOWARD MARKETING 
 

3. DETERMINE YOUR AUDIENCES AND HOW TO REACH THEM FROM INCEPTION


4. WHEN YOU HAVE FINISHED YOUR FILM, YOU ARE HALF DONE
 

5. WE MUST TAKE BACK THE THEATRICAL EXPERIENCE AND REDEFINE IT AS LIVE EVENT/ THEATRICAL
 

6.  CREATE PRODUCTS PEOPLE WANT TO BUY
 

7. DIGITAL RIGHTS ARE A MINEFIELD – BE CAREFUL 

8. ENTERTAINMENT COMPANIES MUST MOVE BEYOND OLD WAYS OF DOING BUSINESS
 

9. EXPLORE NEW WAYS TO TELL STORIES 

10. WE MUST SUPPORT EACH OTHER AS A COMMUNITY


 Article complet de indieWIRE rapportant le manifeste de Jon Reiss

This classification of theatrical markets wasn’t always the case. In the earliest days of motion picture films, screenings occurred in a variety of spaces: storefronts, tents, public parks, churches. Films often toured with vaudeville acts or circuses or on their own. 

It is time for filmmakers to reclaim the meaning of a theatrical release so that it is inclusive of a multitude of live-screening event scenarios.  

Festivals should open up their communities of audiences for new ways of collaboration with filmmakers seeking to engage with those audiences.  

We must embrace new forms beyond the short and the feature and recognize that a film can be one part of a larger narrative universe that can be explored in a variety of mediums. 

Article complet de indieWIRE rapportant le manifeste de Jon Reiss

11.14.2009

Les herbes folles . Alain Resnais


Mais d’où viennent ces herbes folles se faufilant en touffes entre les fissures des pavés? Pourquoi là et pas dans un pré? C’est cette même douce aberration qui nous prend face à l’histoire de Georges Palet, histoire qui naît lorsqu’il trouve, par hasard, le portefeuille ayant été dérobé à Marguerite Muir à sa sortie d’une boutique de chaussures. Histoire qui s’enracine, tenace mais incongrue, avec l’insistance irrationnelle qui pousse – et repousse – l’un et l’autre à se retrouver.

L’origine de leur rapport est due au hasard et pourtant les deux personnages semblent le vivre comme un appel du destin. Mais cet appel est constamment contrarié. Palet ne peut s’empêcher de la plus grande rudesse, de la plus incompréhensible impertinence lorsqu’il se sent pris sur le fait de la désirer. Muir n’est jamais là : c’est par son répondeur, sa boîte aux lettre, sa voisine ou son amie qu’il communique avec elle. Elle joue le rôle – hypocrite ? – de la sage amie lorsqu’elle comprend que Palet est marié. Autant d’obstacles qui ne découragent pas leurs instincts à transformer ce hasard en une chance, celle de la rencontre passionnelle de leurs destins.

Les personnages du film de Resnais ont cette certitude inconsciente que les être humains sont munis d’un destin flamboyant, comme au cinéma. Aussi, quand Palet trouve un portefeuille égaré, une trame sonore tendue, propre au suspense cinématographique, se fait entendre et laisse envisager une suite à venir de péripéties et revirements époustouflants. Il ne s’agira pourtant que d’un événement commun, pas quotidien mais tout de même pas si étonnant, qui se réglera en toute honnêteté, sans surprises. Il annonce un destin qui n’est pas aussi impressionnant que celui des héros de cinéma mais tout aussi important et grave pour ce personnage.

L’histoire est banale, tout dépendant du point de vue : les mobiles des personnages sont si syncopés et éparpillés dans tous les sens, les façons elliptique et hirsute qu’ils ont d’occuper leur monde laissent tout le loisir, à ceux qui voudront s’y perdre, de leur inventer des passés et des futurs héroïques. Mais justement, l’intérêt est de sentir que la petite vie de ces personnages est vécue comme au cinéma, à la légère mais avec un tel sérieux, une telle propension au fatal destin. Et on y croit, au poids de leurs existences, comme à la nôtre, par extension. Et on entend toujours le musique de suspense en nous voyant, à vol d’avion, sortir du cinéma, à ce demander quel mystère nous attend, « … qu’est-ce que je vais faire cet après-midi? ».

11.13.2009

The Imaginarium of Dr. Parnassus . Terry Gilliam


Terry Gilliam est de retour avec sa foi au pouvoir de l’imagination dans son dernier long-métrage. Même fouillis habituel, il ne s’agit pas d’une révélation lumineuse mais plutôt d’un grand spectacle clair-obscur. Après avoir prouvé au diable que les histoires faisaient tourner le monde, le docteur Parnassus obtient la vie éternelle et doit alors vivre avec le poids de perpétuer ces histoires essentielles. Le diable lui lance sans arrêt des paris pour le contredire et il en vient à mettre sa fille en gage. Si Gilliam rapporte justement le pouvoir des histoires et de l’imagination au caractère sacrées qu’elles ont toujours eue pour l’homme – tout en évitant les traditions chrétiennes par un grand détour par une mythologie orientaliste – il reste que son propre film délaisse le soin de se raconter intelligiblement pour celui d’assurer un pur délire imaginatif.

Côté imagination : mission accomplie. Surtout pour ce qui est de l’utilisation des technologies de modélisation par ordinateur. L’univers du docteur Parnassus est très semblable à l’aventurier baron Munchausen que Gilliam a porté à l’écran il y plus de vingt ans : pur génie d’imagination pris pour le pire des charlatanismes. Les deux films se rejoignent aussi sur leur utilisation un peu décalée des effets spéciaux : si le baron évoluait dans des décors cartonnés grandioses mais bidons, le monde imaginaire du docteur est fait de modélisation numérique éclatée et tout aussi bidon. Peut-être le dernier film de Gilliam recevra le même accueil tiède que celui du baron Munchausen, pure aberration dans la décennie de l’explosion des effets spéciaux. Pourtant, l’Imaginarium se place parmis les films les plus inventifs en ce concerne l’utilisation des effets spéciaux numériques, aux côtés des deux derniers films de Tim Burton (Charlie and the Chocolate Factory et Sweeney Todd) entre autres.

Beaucoup pour les yeux, mais très peu pour une vision claire de ce nouveau cinéma numérique à venir. Trop peu pour y voir une solution donc. Le film de Gilliam reste dans un entre-deux, ne laisse qu’imaginer.

Le plus impressionnant effet spécial du film reste par contre la littérale ressuscitation de Heath Ledger : il apparaît pour la première fois à l’écran mort pendu – ne l’avait-on pas aussi laissé pendu à la fin de The Dark Knight ? – pour être réanimé par la troupe de saltimbanques du docteur Parnassus. Était-ce prévu par le réalisateur? Peu importe, l’effet d’outre-tombe est sidérant.

 

 

11.11.2009

Irène . Alain Cavalier


Alain Cavalier se pose en explorateur dans son dernier film. Explorateur de ses propres souvenirs de sa femme décédée lors d’un accident de voiture plus de 35 ans auparavant. Que ce soit par le biais de du journal qu’il a tenu les deux années avant le drame ou dans les lieux qu’ils ont habités ensemble, le film est un long processus de recherche de ce temps perdu, celui vécu comme celui qui n’a pu l’être. 

Alain Cavalier est un explorateur du processus de fabrication d’un film. Caméra vidéo à la main, il se présente seul aux spectateurs. Il chuchote le défilement de ses pensées, des passages de son journal, des descriptions des lieux qu’il nous fait visiter et les rapports d’événements du passé. Son film sur Irène, il en parle comme d’un autre film que celui auquel on assiste. Il se demande à plusieurs reprises s’il ne devrait pas le laisser tomber, changer d’angle d’approche. Nous assistons aussi à des révélations. L’enthousiasme est vivement ressenti lorsqu’ nous parle de sa naissance et de l’avortement d’Irène à l’aide d’une pastèque, un œuf et une pince de cuisine. C’est une libération plutôt qu’un réel ressentiment qui surgit finalement lorsqu’il trace les traits plus sombres du portrait de sa femme – il lit dans son journal : « Ne peut-elle pas simplement mourir? » – puisqu’ils se révèlent, autant pour le réalisateur que pour les spectateurs, être les traits les plus sensibles et les plus humains, les plus appréciables, de cette femme disparue. À trop vouloir s’en rappeler en bien, le personnage d’Irène devient intangible, inintelligible – infilmable, comme s’en rend compte Alain Cavalier – et sa disparition ne fait que devenir plus insoutenable. Et le plus cruel du souvenir d’un être disparu apparaît en même temps comme un soulagement : on ne voudrait pas se remémorer les côtés sombres du défunt, en garder un portrait intact, mais la perte est plus tolérable lorsqu’on les tient en compte. C’est ce portrait final, que ni lui ni le spectateur pouvait envisager au début de la projection, qui fini par faire d’Irène, sans l’ombre d’un doute maintenant, un film, un vrai.

Alain Cavalier est aussi explorateur de l’intimité comme fonction propre au cinéma. Il se rend aux confins des possibilités de cette forme d’art paradoxale : à la fois média de masse et œuvre en lien direct, unique et privilégié avec son spectateur. Son film est en danger tout au long de la projection, non seulement par ses propres tentations de tout abandonner mais surtout parce qu’il risque à tout moment de ne rester que des traces vidéographiques éparses telles une vidéo rapportant des vacances familiales. Ce genre de vidéo nécessite un commentaire du vidéaste, faisant le lien entre les images et avec les spectateurs. C’est précisément ce que fait Alain Cavalier en voix off, révélant un mécanisme somme toute propre à tout film : outre le fait de montrer en image, il faut aussi que le film se raconte au spectateur. Il se raconte normalement sans se dévoiler, en laissant au spectateur l’impression qu’il participe à la construction du film. C’est dans cette limite entre le dévoilement du boniment du réalisateur et l’espace laissé au spectateur pour participer à la construction du personnage d’Irène que ce situe tout le danger du film et l’agilité et la grâce d’Alain Cavalier.

10.31.2009

Bouclier-miroir

Du cinématographe nous offre une réflexion autour du rapport entre réel et image cinématographique dans l’ouvrage de Siegfried Kracauer Therory of film : The redemption of physical reality. Je me permet de citer un extrait pour vous inciter à aller lire en entier :

« Kracauer, dont je reprends ici les termes, rapproche le cinéma du mythe de Méduse : monstre horrifiant statufiant toute personne de son regard, elle est décapitée par Persée qui, grâce à son bouclier-miroir, peut l’approcher en évitant ce regard. Méduse, c’est l’horreur du réel, la réalité terrifiante que nous ne pouvons contempler directement, tout événement monstrueux que nous peinons à concevoir sans trembler. Le bouclier-miroir, c’est le cinéma, c’est l’outil grâce auquel nous pouvons non seulement enfin approcher cette horreur et la voir réellement, par le truchement d’une seule réflexion, mais aussi grâce auquel nous pouvons décapiter l’horreur, donc la dépasser sans l’écarter, en l’affrontant plutôt par le seul moyen possible, celui de la représentation. » . article entier .

3-D (suite)

Un regard lucide porté par Kristin Thompson sur le cinéma 3D dans son article Has 3-D already failed? sur le blog de davidbordwell.net. Cette nouvelle approche technologique poussée par les grands actants du cinéma hollywoodien pourrait bien transformer notre manière de voir les films, que ce soit comme ils le prévoient ou non. Article à lire.

“Right now, the big proliferation is in tiny personal screens, iPod Touches, cell phones, portable gaming devices. Will teenagers allow themselves to look dorky by sitting with 3-D glasses staring at their phones? […] ­So far, it is a remarkably inadaptable technology to try and force on people whose movie-playing gadgets change every few years.”  . Article entier .

10.25.2009

Antichrist . Lars Von Trier



D’une beauté formelle sidérante, le film de Lars Von Trier fait vivre toute la colère du cinéaste avec autorité. Expérience physique et mentale de haute intensité. Satire excellemment exécutée du genre filmique de l’horreur, Antichrist s’enfonce d’abord tout en profondeur dans les méandres des identités sexuelles. Elle (Charlotte Gainsbourg) tombe dans un profond et douloureux deuil suite à la mort accidentel de son enfant. Son mari (Willem Dafoe), psychothérapeute de profession, prend en charge sa guérison. Être d’une rationalité fondamentale, il tente de retracer la source du mal de sa femme, y voyant d’abord de simples symptômes du deuil de leur enfant, ensuite un trouble plus enfoui relié à la nature et la forêt où ils possèdent un abris et puis une psychose entourant la chasse aux sorcières (elle croit que les femmes sont effectivement à l’origine du mal). Elle se laisse tout d’abord aller à une soumission docile à la thérapie dominatrice de son mari ou à un combat tourmenté contre ses propres croyances misogynes. Mais elle n’arrive pas à trouver sa place dans le monde rationnel de son mari qui lui fait croire à sa libération de l’oppression masculine dans un cadre qu’il lui impose qui est des plus oppressants. Elle se fait alors pur mal, incarnant le seul rôle qui ait été identifié aux femmes, celui de Satan, que c’ait été comme objet de l’oppression masculine ou comme celui de l’Église. Évidemment, l’affirmation ainsi faîte est des plus absurdes et c’est à ce niveau que les accusations de misogynies ont fusées contre le cinéaste.

On ne peut porter de tels réprimandes qu’en prenant le film au premier degré, en étant aveugle à la satire du film d’horreur qui nous ait livrée. Plusieurs éléments de la mise en scène se posent comme fonctions satyriques. La musique pompeuse et les images noir et blanc au ralenti des prologue et épilogue sont des plus risibles. Origine et conclusion du récit sont les signes les plus flagrants de la position autocritique du film. Les animaux icônes des trois mendiants structurant l’histoire sont si visiblement animés par ordinateur qu’il n’est pas étonnant de voir le réalisateur les tourner d’autant plus au ridicule lorsque le renard prononce : « Chaos reigns » d’une voix d’outre-tombe. La bande son vrombissante, clairement associée aux segments qui se veulent typiquement horribles révèle clairement les mécanismes du genre caricaturé. Toute cette dynamique dichotomique opposant homme et femme comme on oppose bien et mal est sans doute tournée au ridicule.

Le film ne s’annule pas pour autant, ne devient pas qu’un film d’horreur insipide et de mauvais goût. Le propos est détourné vers un problème plus profond : la division biologique binaire des humains. La scène de l’excision qu’elle se perpètre elle-même en est le point culminant. Possédant la même fonction satirique du genre de l’horreur, le gros plan sur le clitoris sectionné est si grossier qu’il tourne à l’absurde la simple idée qui passe par la tête de la femme : qu’en se débarrassant de son attrait sexuel la déterminant femelle elle pourrait du même coup rejeter tout le cadre restreignant imposé aux femmes, se libérée du mal qu’elle se sent soumise à incarner. En gros, Antichrist se pose comme un espace-temps où se déchaine toute l’horreur, et son absurdité, de la division des sexes qui gère toujours nos sociétés. Il n’y est pas question spécifiquement de la condition des femmes, ni de celles des hommes, mais il s’agit plutôt du constat cynique et enragé de l’absurdité de la division des sexes. Ce qui est le plus troublant et choquant du film de Lars von Trier ne sont pas les scènes explicites et le sujet à premier abord simpliste et misogyne mais bien le ton sincèrement colérique et le constat de la soumission des êtres humains à un bête système binaire qui leur refuse la liberté auquel ils croient tendre.

 

Pour une interprétation de la dédicace à Andrei Tarkovsky faite à la fin du film et une analyse théologique plus complète du film, je vous suggère la lecture de Antichrist : the visual theology of Lars Von Trier de Tina Beattie sur opendemocraty.net.