Le film de John Huston – basé sur une nouvelle de James Joyce, tirée de The Dubliners – se présente comme une collection de rituels mondains partagés par un groupe de personnes à l’occasion de l’Épiphanie : danse, chants, récitation d’un conte ou la tradition du vœu entre deux personnes tirant sur l’os de la dinde sont les rites les plus évidents. Huston les montres avec une attention toute particulière à l’aide de longs gros plans mettant le temps en suspension. D’autres événements tiennent aussi de rituels que l’on pourrait qualifiés de familiaux. Il y a par exemple l’alcoolisme de Freddy Malins qui est anticipé longuement avant sont arrivée à la soirée. Il semble alors qu’il soit toujours bourré et surtout, qu’il gâche à tout coup ce genre de soirée. Il lui arrive en effet d’être un peu dérangeant sans pour autant vraiment mettre en péril la poursuite de la fête. Sa mère se fait d’ailleurs un devoir de démontrer le plus explicitement possible son mécontentement vis-à-vis du comportement de son fils. La manière dont est traité l’alcoolisme de Freddy par la parenté tient presque d’une tradition et il est même à considérer l’option que s’il est saoul à toutes les années c’est qu’il se sente obligé de ne pas décevoir les attentes des convives.
De la même manière, le film se reçoit comme un collier de micro-récits. Tous les commentaires et histoires que se passent les personnages sont finaux aussitôt dits. Le principal intérêt devient alors de tenter de retracer le fil qui relie tout les morceaux de récits qui composent le film. Une incertitude se pose alors : il n’est pas certain que le spectateur doivent déceler le « mystère » qui rendra cohérent tous les événements qu’on lui présente où s’il devra plutôt se contenter de les observer tels qu’ils sont sans chercher à leur trouver de signification supplémentaire. C’est le problème qui frappe aussi le personnage principal – Gabriel Conroy: toutes ces cérémonies semblent vide de sens concret, simplement répétées par tradition et sans attache à la réalité. Les scènes finales, alors que la fête est terminée et que Gabriel et sa femme Gretta se rendent à leur appartement, présentent l’apparition de cette prise de conscience par le personnage. Bien qu’il ait été mal à l’aise tout au long de la soirée, il lui apparaît évident alors que ce qui est à l’origine de toutes ces cérémonies lui échappera à jamais, il n’arrivera jamais à les comprendre rationnellement. C’est au travers d’un enchaînement d’événements entre lui et sa femme que cette révélation est mise à jour. Il la voit pleurer dans les escaliers de l’hôte en écoutant une chanson. Ils n’arrivent pas à se parler sur le chemin de retour, ils ne sont pas sur la même longueur d’onde. À leur arrivée, il lui demande pourquoi elle pleurait et elle lui répond alors avec une profonde tristesse que la chanson entendue lui rappelait un amour de jeunesse, décédé avant qu’ils n’aient pu le concrétiser. Il comprend alors – dans un monologue en voix off tiré mot pour mot de la fin de la nouvelle de Joyce – qu’il ne pourra pas, malgré tout ses efforts, connaître sa femme comme elle l’a été pour ce premier amour.
21.12.9 – 20h30 – Le Champo - Paris
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